Albert EINSTEIN a été Président d’honneur de l’OSE de 1923 jusqu’à sa mort en 1955.
Pour comprendre ce qu’est l’OSE aujourd’hui, il importe de connaître le destin de ces femmes et ces hommes qui ont joué un rôle majeur dans l’histoire de l’association.
A toutes les époques, à toutes les étapes, ils ont apporté leur pierre à l’édifice.
L’OSE leur doit beaucoup et c’est pourquoi elle tient à mettre en lumière leur parcours au sein de l’association. La plupart de ces grandes figures ont donné leur nom à nos centres. Une manière de leur rendre doublement hommage.
Pour découvrir l’histoire de ceux qui ont façonné l’OSE, cliquez sur leur nom :









En août 1912, le ministère de l’intérieur russe autorise la création à Saint-Pétersbourg de la Société pour la protection sanitaire des populations juives (Obshtshestvo Zdravookraney Evre ou OZE).Cette autorisation surprenante intervient dans une période de délitement de l’Empire tsariste et de relative libéralisation, après les pogroms contre-révolutionnaires et « patriotiques » de 1905 et la violente campagne antisémite déclenchée par l’affaire Beilis, ce juif accusé de meurtre et finalement acquitté. De plus, la création de l’OZE coïncide avec l’affirmation d’un mouvement culturel juif autonome.Lors de sa première assemblée générale qui réunit plus de 200 personnes, le 28 octobre 1912, l’association élit ses membres directeurs. Il s’agit de médecins et militants associatifs, issus des organisations de médecine populaire russe, telle que la puissante association Pirogov, dont l’OZE s’inspire à ses débuts.
En s’appuyant sur les organisations communautaires existantes, telles que l’hôpital juif, ainsi que sur des scientifiques compétents, et en intéressant les cercles les plus larges de la population, l’OZE installe des comités dans toutes les grandes villes de Russie. Dispensaires, centres infantiles ou Gouttes de lait, maisons d’enfants et centres sportifs voient ainsi le jour. Entre 1912 et 1914, des programmes de formation de médecins pédiatres sont lancés dans 102 villes et 22 provinces, ainsi que des cours élémentaires d’initiation aux règles de la médecine, de l’hygiène et de la santé. Paraissent à la même période, des ouvrages de vulgarisation populaire et des brochures en yiddish traitant de ces mêmes sujets. Des semaines et journées de propreté sont organisées par les différentes sections de l’OZE avec le concours des écoliers eux-mêmes.L’association s’étend à l’intérieur de la zone de résidence des Juifs de l’empire, en particulier en Pologne et Lituanie. Des bains publics sont installés à Varsovie, Kaunas, Chisinau et Balti, ainsi que des buanderies communautaires comme à Vilnius. Les objets de toilette – savon, brosse à dents, pâte dentifrice – sont distribués à titre gracieux ou à prix réduit.
La Première Guerre mondiale oblige l’OZE à reconsidérer ses priorités et à s’occuper des blessés et des réfugiés.À partir de juillet 1914, puis lors de la retraite russe de 1915 et du pogrom de Minsk, l’OZE met en place des colonnes mobiles d’équipes sanitaires, afin de suivre les populations juives déplacées ou évacuées de la ligne de front. Par trains entiers, dans des wagons de marchandises, des centaines de milliers de personnes, soupçonnées de sympathie pro allemande, sont chassées du duché de Kurland et de la région de Kovno. D’autres errent sur les chemins, sans nourriture, logis, ni soins élémentaires, à la merci de la redoutable armée tsariste.
À l’appel d’organisations telles que l’OZE, l’ORT et l’EKOPO (organisme d’aide aux victimes de la guerre), des détachements de la jeunesse juive encadrent les populations, fournissent les premiers soins et rédigent les rapports concernant les victimes des pogroms à l’intention des députés juifs de la Douma.Dans les grandes villes comme Saint-Pétersbourg, Smolensk, Minsk, mais également Vitebsk, des comités d’aide permettent la création de soupes populaires, de structures de quarantaine pour les malades contagieux, de bains publics et de centres de désinfection.
En 1919, les communautés juives sont dissoutes, de même que tous leurs organes.Les organisations comme l’OZE, l’ORT et l’EKOPO peuvent néanmoins poursuivre leur action jusqu’en 1922, date de leur nationalisation par les Bolcheviques. Sous couvert du comité Nansen, comité international pour les réfugiés, puis du Joint, l’OZE choisit de poursuivre son activité en Ukraine, dans les régions de Kharkov, d’Odessa et de Kherson, où se trouvaient des milliers de réfugiés, jusqu’à la nationalisation définitives de tous ses équipements. La société Agro-Joint-OZE est créée pour venir en aide aux colonies agricoles juives en Russie.
Avant de quitter la Russie, l’OZE se mobilise lors des pogroms de Biélorussie en juillet 1921, annonciateurs du génocide à venir. L’association fournit nourriture, vêtements et médicaments aux populations juives, par le biais d’une section d’aide immédiate envoyée spécialement sur place. Une colonie mobile est chargée de prendre en charge les enfants touchés par les pogroms et de les placer dans deux maisons d’enfants situées dans la province de Minsk, à Oyezd.
Dès 1922, les dirigeants s’efforcent de transporter les fondements de leur organisation en Europe centrale et orientale. Des filiales, avec des institutions sanitaires propres, sont créées dans les pays devenus indépendants à la suite du traité de Brest-Litovsk de mars 1918 : Lituanie, Bessarabie, Pays Baltes et surtout Pologne, où l’association prend le nom de Towarzystwo Ochrony Zdrowia ou TOZ.Grâce aux relations avec les communautés juives d’Europe occidentale et d’Amérique, les bases de l’Union-OSE sont jetées.
À Berlin même, dans le quartier Scheunen, l’OSE vient en aide aux 30 000 réfugiés juifs de Pologne et Russie, démunis de tout, en mettant sur pied des consultations médicales gratuites, une colonie de jour pour les enfants, à Grünewald, et en organisant des conférences pour promouvoir l’hygiène.En 1922, le comité de Berlin décide d’ouvrir une section de l’OSE à Dantzig pour organiser l’aide médicale en direction de tous les réfugiés fuyant la Russie bolchévique.En septembre 1923, la Jewish Health Organisation in Great Britain, la section de l’OSE à Londres, est créée dans le but d’aider le comité central dans ses recherches de matériel pour les sections d’Europe centrale et orientale, grâce à l’appui de médecins renommés.Outre la collecte d’argent en Angleterre, le comité londonien commence à travailler dans le quartier juif de White Chapel : conférences d’éducation populaire, brochures, service de surveillance médicale dans les Talmud Tora et centres de soins pour les enfants déficients y sont organisés.En 1925, une délégation de l’OSE constituée de trois membres de son comité central se rend en Amérique pour faire connaître le travail de l’OZE et augmenter l’aide en provenance du judaïsme américain. La création d’un comité local américain permet de renforcer les liens avec le Joint.
L’association vient en aide aux médecins persécutés, en particulier juifs allemands, en mettant sur pied un service spécial de réinsertion professionnelle, en lien avec la ligue mondiale des médecins juifs, dont elle impulse la fondation en 1936, à Tel Aviv. Les débats sur l’opportunité d’une telle création montre sa clairvoyance politique sur les dangers à venir.
Les jeunes Juifs allemands, arrivant de plus en plus nombreux à Strasbourg, après la Nuit de cristal, sont pris en charge par Andrée Salomon qui, à cette occasion, prend contact avec l’OSE. Elle en dirigera le service social jusqu’en 1947.
Le comité OSE zone Nord est confié à Falk Walk et Eugène Minkowski. Celui-ci, déjà membre du Comité de la rue Amelot, organise un circuit clandestin d’enfants avec une petite équipe de femmes courageuses, dont Enea Averbouh sert de façade légale. Le Dr Irène Opolon, munie de vrais faux papiers et décidée à ne pas porter l’étoile jaune, convoie les enfants et assure le paiement des nourrices. D’autres assistantes sociales font le même travail, grâce à des relais institutionnels du département de la Seine. L’OSE travaille en étroite liaison avec les Éclaireurs israélites, la WISO, le Comité de la rue Amelot et le mouvement Solidarité (communiste) pour organiser le placement des enfants. Près de 600 enfants sont sauvés sur un total de 4 000 dans la zone nord.
Les Allemands entrent en zone Sud. Les Juifs quittent les départements côtiers. L’OSE se déplace en fonction de cette migration. Elle ouvre les centres de Limoges, de Nice, de Megève, de Saint-Gervais et de Chambéry. A Toulouse et Pau, les équipes quadrillent tous les départements environnants, souvent en lien avec les EI.
À Lyon, capitale de la Résistance, l’équipe du Docteur Lanzenberg, intervient jusqu’à la Libération et étend son activité à Grenoble. Les descentes de la Gestapo en 1943 et 1944 sont responsables d’un nombre important d’arrestations, dont celle de Madeleine Dreyfus. Au total, l’OSE a su mobiliser plus de 25 médecins et une cinquantaine d’assistantes.
La direction de l’OSE, assurée par Joseph Millner et Valentine Cremer, tous deux de nationalité française, se replie à Vic-sur-Cère, puis dans la zone italienne à Chambéry. Elle travaille avec le bureau de l’Union OSE, indépendant de l’UGIF, et surtout avec l’OSE de Genève, qui redistribue l’argent du Joint, nécessaire au financement de toutes les opérations.
Après la fameuse « nuit de Vénissieux » d’août 1942 (Lire Lyon contre Vichy, août 1942 – Le sauvetage de tous les enfants juifs du camp de Vénissieux, Valérie Perthuis-Portheret, préface de Serge Klarsfeld, éd. Lyonaise d’Art et d’Histoire/ Rhônes-Alpes / Israël Echanges, 2012), au cours de laquelle 108 enfants furent sauvés de la déportation, Joseph Weill fait appel à Georges Garel, un ingénieur juif français lié au réseau Combat, pour organiser un circuit clandestin d’enfants. Malgré les innombrables difficultés, le réseau couvrant quatre grandes régions de la zone Sud, à l’exception des alentours de Nice, confiés au réseau Marcel (Le réseau Marcel, Fred Coleman, éd. Acropole, 2015), est opérationnel dès l’été 1943. La fermeture définitive des maisons prend cependant plus d’un an. Chaque région fonctionne de manière cloisonnée et autonome, sous la direction d’un responsable de région.
Depuis Lyon, Georges Garel coordonne l’ensemble, organise l’infrastructure technique (faux papiers, vestiaire, convoyage), gère les liaisons avec toutes les organisations amies. Perpétuellement en déplacement, il prend les décisions politiques, visite les régions, apporte l’argent, pallie aux arrestations. Grâce à ses contacts personnels auprès de Monseigneur Saliège, Archevêque de Toulouse, et à celles des assistantes juives et non juives de son réseau, des familles, des couvents et des internats sont prêts à accueillir les enfants dont on a, au préalable, changé l’identité et coupé les liens avec leurs parents. Toutes les couches de la population française se mobilisent par l’intermédiaire d’associations, comme la Cimade et les pasteurs protestants autour de Marc Boegner, les Amitiés Chrétiennes de l’abbé Glasberg. Jusqu’à la Libération, 2 400 enfants ont pu être sauvés (1 600 enfants « aspécifiques » pour le circuit A et 800 enfants « spécifiques » pour le circuit B, placé sous la responsabilité d’Andrée Salomon).
La mise en place des passages en Suisse remonte à avril 1943, à la suite de négociations avec les autorités helvétiques pour l’arrivée d’enfants seuls. Plusieurs passeurs travaillant directement sous les ordres de l’OSE sont engagés à cet effet. Jenny Masour avec Robert Job et les responsables des maisons opèrent le choix des enfants particulièrement menacés qui sont envoyés dans les nouvelles maisons de la zone italienne, Moutiers-Salins et Saint-Paul-en-Chablais, ou encore par groupes de 6 à 10 vers la Suisse. En août, les passages sont intensifiés, suite à l’évacuation des centres de résidence assignée de Saint-Gervais et Megève.Après septembre 1943, avec la ruée des Allemands dans la zone italienne, la tâche devient plus difficile. L’organisation des passages vers la Suisse est confiée à Georges Loinger. A la suite d’arrestations successives, les convois d’enfants sont pratiquement interrompus de novembre 1943 à mars 1944, date à laquelle ils reprennent de manière accélérée, préparés conjointement par l’OSE, la Sixième (le circuit clandestin des EIF) et le Mouvement de la jeunesse sioniste (MJS). (Lire La fuite en Suisse : Les juifs à la frontière franco-suisse durant les années de la “Solution finale”. Itinéraires, stratégies, accueil et refoulement , Ruth Fivaz, préface Serge Klarsfeld, éd. Calmann Lévy, 2020)
L’arrestation d’Alain Mossé et de tous les membres du bureau de l’OSE-UGIF à Chambéry oblige l’organisation à plonger dans la clandestinité totale. Elle décide la fermeture des dernières maisons d’enfants et de tous les centres et bureaux. La direction continue à œuvrer par des rencontres périodiques à Lyon, chez René Borel ou dans les wagons des trains immobilisés.
Un groupe de 74 enfants part par l’Espagne pour rejoindre Eretz Israël, sur le bateau Guinéa. C’est Andrée Salomon qui insiste pour évacuer des enfants qui ont de la famille en Palestine. Mais l’entreprise est risquée car le passage par l’Espagne est beaucoup plus long et dangereux que le passage de la frontière suisse. Elisabeth Hirsch est désignée pour accompagner une douzaine d’entre eux en avril 1944. Après de longues péripéties, le groupe embarque à Cadix le 6 octobre.
Dès la Libération, des assistantes sociales sillonnent les départements à bicyclette sur les traces des enfants. Puis, à partir de 1948, l’OSE participe aux différentes commissions de dépistage, financées par le Joint, pour rechercher les enfants non réclamés. Très vite aussi il faut organiser des cours de rattrapage pour ceux qui sont destinés à suivre des études. Les maisons de province, trop isolées, sont transférées dans la région parisienne. Les plus petits sont à Meudon, les plus grands au Vésinet. Les filles à Saint-Germain, puis Draveil. Les plus religieux à Taverny et Versailles. En 1949, il reste encore une douzaine de maisons (Lire Les enfants de l’après-guerre dans les maisons de l’OSE, Katy Hazan, éd. Somogy, 2012).
« L’enfant est le centre de nos préoccupations, l’enfant tel qu’il est aujourd’hui, mais aussi l’homme qu’il sera un jour. Sans une image de l’homme de demain, nous sommes incapables d’élever l’enfant qui nous est confié à présent. » Nous, bulletin de pédagogie et d’orientation professionnelle OSE, avril 1945.
Le congrès pédagogique de 1946 définit les grandes lignes : un climat qui se rapproche autant que possible du climat familial et du milieu d’origine, une neutralité dans le programme pédagogique des maisons, mais respectueuse de l’âme collective juive pour arriver à l’épanouissement maximum de chaque personnalité. Tout semble dit et pourtant que de débats ! Le « minimum OSE » est variable. Culture, religion, ambiance juive : les options pluralistes de l’OSE excluent tout cadre rigide. Certaines maisons se rapprochent du judaïsme traditionnel, d’autres s’apparentent au judaïsme libéral. L’important est la conscience d’être juif. Cette diversité jamais démentie, fait sa richesse et sa réussite.
Des centres médico-sociaux s’installent dans toutes les grandes villes de province et doivent faire face aux urgences : accueil des déportés, aides de première nécessité, secours financiers, colis, vêtements, literie, reclassement professionnel en liaison avec l’ORT. En outre, des colonies de vacances sont mises en place dès la fin de la guerre dans un but à la fois hygiéniste et éducatif.
Le 11 avril 1945, les soldats américains sont stupéfaits de découvrir près d’un millier d’enfants à Buchenwald. La France accepte d’ouvrir ses frontières à 426 d’entre eux, à condition que l’OSE prenne tout en charge. Début juin 1945, ils quittent le camp pour la France. Le 6 juin 1945, l’OSE héberge ces garçons originaires de Pologne, de Roumanie, de Tchécoslovaquie et de Hongrie, dans le préventorium d’Ecouis, lieu de transit mis à disposition de l’association par le gouvernement français. C’est là qu’ils deviennent les « enfants de Buchenwald ». Certains ne restent pas longtemps à Ecouis et partent pour la Palestine. A la fermeture d’Ecouis, 17 d’entre eux ont retrouvé des attaches familiales en France et 33 ont été placés dans des familles d’accueil. Les autres sont envoyés à Ambloy, puis Taverny, dans le foyer de la rue Rollin, à Moissac et dans les maisons d’enfants.Sur les 426 venus en France, seule une petite vingtaine est restée et a demandé la nationalité française. Les autres « garçons » de Buchenwald se sont dispersés sur les cinq continents. (Lire Une enfance à nulle autre pareille, David Perlmutter, éd. Les editions Ovadia, 2019 – J’avais quinze ans, Elie Buzyn, éd. Alisio Poche, 2019 – Après le bois des hêtres, survivre à Buchenwald, Armand Bulwa, éd. Archipel, 2020)
Les branches se développent à travers le monde, avec des priorités en fonction des évènements. L’urgence en 1946 reste l’Europe et ses millions de réfugiés. L’OSE s’étend dans tous les pays de l’Est, Bulgarie, Hongrie, Tchécoslovaquie, Roumanie. La branche polonaise (TOZ) renaît de ses cendres. L’année d’après, suite à différents rapports de Valentine Crémer et d’Enéa Averbouh, l’OSE entreprend un travail pionnier en Afrique du Nord, tandis qu’en 1948, elle se mobilise pour le jeune État juif.
En Palestine, l’OSE, fondée pendant la guerre, est une organisation embryonnaire sans bureau stable, avant la création de l’Etat d’Israël. La seule action d’envergure porte sur une colonie d’été de Kfar Sion, près de Jérusalem et un sanatorium à Netajim, près de Richon-le-Sion. En 1945, des liens se tissent avec la France, en faveur du regroupement familial. Des enfants, dont les jeunes rescapés de Buchenwald, partent rejoindre des membres de leur famille.Un gros effort est fait après la guerre d’indépendance, pour les enfants arrivés de Chypre et placés dans la maison de Sarona. Les convalescents de la jeunesse combattante sont, eux, accueillis dans la maison de repos de Beth Berl, à Naan. Dans une tentative d’amélioration de la nutrition de tous les enfants du pays, l’OSE distribue des vivres parmi les enfants pauvres des villes non assiégées.Des services mobiles de pédiatrie et de stomatologie apportent leurs soins dans les agglomérations isolées, en particulier dans les maabarot. On trouve aussi des crèches médicales pour enfants déficients, afin de lutter contre la mortalité infantile.Enfin, l’Union OSE se charge de la surveillance médicale des candidats européens à l’aliyah, en particulier au camp du grand Arenas à Marseille, mais également dans les maisons transitaires de l’aliyah des Jeunes.
Dès la Libération, Raffaele Cantoni, antifasciste de la première heure et sioniste militant dans l’union de la communauté juive italienne, créée une nouvelle branche de l’Union OSE. Elle se justifie par l’état des communautés et le fait que le pays soit une des plaques tournantes pour l’arrivée des Juifs des pays de l’est, dont en 1946, 7 000 réfugiés dans des camps ou des harsharoth appelés Kiboutsim, en attente de départ soit vers les États-Unis, soit vers la Palestine. Des comités OSE se forment dans chaque grande ville : Rome, Milan, Turin, Florence, Trieste. Malgré la présence de médecins, l’activité s’oriente, vers le secours aux enfants.En 1946, l’OSE-Italie se spécialise dans les colonies de vacances Riccione, Ostia ou Canazei dans le Haut-Adige. Elle organise également les vacances pour les enfants qui sont dans les camps de réfugiés, grâce à l’aide du Joint et de l’UNRRA. L’OSE-Italie d’aujourd’hui a gardé cette orientation avec la colonie de Caletta Castiglioncello qui accueille des centaines d’enfants dont des enfants israéliens victimes du terrorisme, et dernièrement des jeunes adolescentes orphelines de Pinsk (Biélorussie). Elle a diversifié ses activités avec un dispensaire, le CSA (Centre d’aide à l’apprentissage) pour des enfants et des adolescents souffrant de troubles d’apprentissage et du langage.Le 8 novembre 2007, l’OSE inaugure une « Ludoteca », appelée « SpaziOSE » dans un quartier populaire de Rome, Zona Marconi, un centre de jour très moderne avec des activités artistiques et culturelles, ainsi que des jeux, pour des enfants de 3 à 13 ans.
Fidèle à ses principes de pionnière dans l’action médico-sociale, l’OSE s’est occupée de la situation des Juifs au Maroc et en Tunisie qui vivaient dans des conditions d’hygiène déplorables dans les mellah et les haras.
L’Union OSE décide la création d’une nouvelle filiale, l’OSE-Tunisie, avec comme objectif « de venir au secours du judaïsme tunisien, grenier du futur judaïsme, mais qui est en danger moral et physique. » Le Dr Léon Moatti en devient président en 1947. À Tunis et Djerba, sont ouvert deux centres polyvalents, avec des consultations multiples, mais aussi des services sociaux, des biberonneries et des gouttes de lait. Le travail prend une autre dimension en 1948 avec l’appui du Joint. Les dispensaires se multiplient rapidement dans tout le pays, à Sfax, l’Ariana, Gabès, Sousse, Nabeul, Tataouine, Bizerte et La Goulette. La campagne des 3 T permet de lutter contre les fléaux de la teigne, le trachome et la tuberculose. Les centres de soin traitent le patient dans sa globalité et tentent de résoudre les problèmes sociaux autant que médicaux, un travail immense et de longue haleine qui a déterminé l’avenir par un changement des mentalités et la pénétration d’idées nouvelles.
Un comité OSE en formation, présidé par le Dr Sam Lévy, dépose les premiers statuts dès novembre 1945, tandis que l’association voit le jour en 1947. Les deux centres pionniers de Casablanca et Marrakech sont créés dans la foulée pour venir au secours des populations des mellahs. Soins prophylactiques, hygiène et travail social essayent de combattre fléaux anciens et mortalité infantile. L’OSE intervient à Tanger et dans les villes de l’intérieur, Fès, Meknès, Séfrou, Kenitra. Des dispensaires et services d’hygiène scolaire travaillent en lien avec les écoles de l’Alliance et celles des Loubavitch, tandis que se multiplient des services médicaux spécialisés pour les vieillards.Actuellement, l’action de l’OSE s’articule autour de 7 axes différents, pour des populations juives et musulmanes, dans les différentes écoles, au centre médical Maïmonide à Casablanca, et dans les villes intérieures, pour des campagnes de prévention et de collecte de sang.
Le travail de l’OSE se modifie car les orphelins sont, depuis 1949, devenus minoritaires. La réflexion de l’organisation s’applique à un nouveau type d’enfants, considérés comme des « cas sociaux », qui demandent d’autres structures. Les bases d’un véritable service social sont jetées. Après la création du premier poste d’assistante sociale, l’association se dote, en 1954, d’un service social indépendant, autour d’une assistante sociale chef, avec deux, puis trois, puis neuf assistantes sociales, formées spécialement avec les méthodes du case-work américain. Il s’agit d’avoir une meilleure connaissance de l’enfant et de préparer son placement en lien avec les parents. L’OSE modifie ses statuts avec les textes législatifs sur la protection de l’enfance et cherche une autonomie financière durable. Les actions de ses équipes pluridisciplinaires sont couvertes financièrement par un prix de journée sur la base d’un mandat administratif ou judiciaire.
L’orée des années 1960 est un formidable défi, avec l’arrivée en métropole des familles séfarades d’Égypte, d’Algérie, du Maroc et de Tunisie. Si la plupart de ces familles dépassent le choc du déracinement, nombreuses seront celles qui vont sombrer avec la perte de leur environnement.Le travail de l’OSE reste placé sous le signe de la réparation des ruptures. Pour ces déracinés à l’identité bouleversée, le code des rapports sociaux et familiaux tel qu’il s’inscrit en France est souvent indéchiffrable. De la même façon qu’ils apprenaient aux enfants allemands à parler français, les éducateurs de l’OSE vont s’attacher à intégrer à la société française les enfants juifs immigrés. Tâche d’autant plus difficile qu’il se révèle indispensable de respecter les fragments rapportés et épars d’une identité incomplète, et que les conflits surgissent facilement dans des foyers à la dérive.
Avec la loi Weil de 1975, le secteur de l’enfance se professionnalise. L’OSE diversifie ses interventions autour de deux grands pôles complémentaires : le placement dans les maisons d’enfants ou dans des familles d’accueil et l’action en milieu ouvert (AEMO).Depuis 1964, et avec l’habilitation définitive de 1976, l’OSE intervient à la demande du service de prévention ou du juge pour enfants pour des « missions d’action sociale portant sur des familles ou des mineurs isolés, de l’un ou de l’autre sexe, qui, par la suite de déplacement ou de transplantation, se trouvent inadaptés à leurs nouvelles conditions de vie ». L’ensemble des services de l’OSE qui participe à cette action psycho-sociale et éducative est contrôlé par les directions départementales des Affaires sanitaires et sociales de l’Ile-de-France.
L’OSE a toujours revendiqué son appartenance au judaïsme, c’est une œuvre juive au service des populations juives en détresse, que ce soit les populations pauvres des shtetl de la zone de résidence, les populations déplacées lors des conflits, réfugiées comme les immigrés en France, ou encore menacées physiquement lors des pogroms ou pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a su représenter toutes les tendances du judaïsme, dans le respect des individus.L’ancrage dans la communauté juive locale se manifeste dans le choix de ses dirigeants. Cet ancrage se manifeste également par le souci de coller aux besoins des populations et de parler la langue adéquate. L’OSE a toujours eu le souci de s’intégrer dans la société de l’époque, de ne jamais se couper des instances gouvernementales. C’est une organisation reconnue, qui a porté ses interrogations sur sa légitimité et son identité. Ainsi, le sigle OZE (Obshetsvo Zdravookranenya Yevreyiev) est-il déjà un habile compromis entre ceux qui voulaient se cantonner à la Russie et ceux qui avaient une vision plus large, concernant l’ensemble du peuple juif.
Organisation sanitaire, l’OSE est donc d’abord une œuvre créée et investie par des médecins, éclairés, profondément juifs et universels, qu’ils soient issus du mouvement hygiéniste de la fin du 19e siècle en Russie ou de Tunisie, du Maroc ou encore de Strasbourg. Des médecins qui croient au progrès humain, qui œuvrent pour le développement des populations défavorisées par le biais de l’hygiène et de l’éducation. Ces mêmes préoccupations se retrouvent aussi bien dans les affiches en yiddish de 1925, que dans la campagne des 3 T (lutte contre la teigne, le trachome et la tuberculose) en Afrique du Nord, après-guerre.
Le secteur de l’enfance apparaît en parallèle avec les centres infantiles, les jardins d’enfants, les colonies de jour ou les maisons d’enfants, mais prend de l’ampleur au fur et à mesure que les guerres se développent, laissant derrière elles des cohortes d’orphelins.En 1922, l’OZE avait imaginé des ambulances mobiles avec cuisines diététiques incorporées pour enfants en bas âge, pour lutter contre la famine. On retrouve ce même souci dans le rapport des médecins des 14 maisons d’enfants de zone Sud, qui, en 1943, montre des courbes de croissance et de poids des enfants.
Dès 1914, elle met en place des structures souples de secours, en particulier des colonnes mobiles d’équipes sanitaires qui suivent les populations déplacées.En 1923, l’Union OSE de Berlin créée une antenne à Dantzig, lieu de passage des réfugiés juifs qui partent de Russie. On la trouve également à la frontière polonaise, vers laquelle Hitler avait renvoyé les Juifs polonais d’Allemagne : un no man’s land où se trouvaient des milliers de réfugiés.C’est encore dans le même esprit qu’elle est présente dans les camps d’internement français comme Rivesaltes ou Gurs. En France, pendant l’Occupation, elle a su, grâce à la clairvoyance politique de certains de ses dirigeants, comme le Dr Joseph Weill, passer à l’illégalité, en mettant sur pied un circuit clandestin d’enfants dit Circuit Garel.En juin 1945, elle est capable d’accueillir 426 enfants de Buchenwald, de trouver les équipements appropriés et du personnel suffisamment qualifié.Après la guerre, en 1947, on la trouve présente sur l’Exodus et dans les camps de transit de Marseille, pour les populations en partance vers Israël.C’est à l’OSE qu’on s’adresse dans les premiers temps de l’affaire des enfants Finaly et c’est Gaby Cohen (Niny) qui les encadrera un temps lorsqu’ils reviennent d’Espagne. L’OSE est là où les besoins, petits ou grands, se font sentir.
La première colonie de jour pour tout-petits a été installée à Montmorency, dès 1934. Elle s’adressait aux enfants des juifs immigrés pauvres et l’OSE se préoccupait déjà de réparer les fractures identitaires, à savoir intégrer ces enfants, tout en leur apprenant « à ne pas avoir honte de la langue de leurs parents, le yiddish ». De plus, le programme de la journée incluait tout ce qui pouvait participer à l’éveil de l’enfant, gymnastique, jeux, spectacles.En septembre 1936, un patronage médico-pédagogique, est initié par le Dr Polinow, mort en déportation. Il s’agit d’un centre d’observation et de réadaptation pour enfants difficiles, sinon caractériels. Là encore, un travail précurseur.Dans le droit fil des ambulances diététiques de 1922, l’OSE inaugure en 1946, à Paris, avec l’appui financier de l’OSE-Mexique, la première voiture stomatologique pour les victimes de la guerre. Composée d’un cabinet dentaire et d’un laboratoire technique, elle complète l’Institut d’hygiène dentaire de Neuilly.De même l’école d’infirmières de Buenos-Aires de 1946 rappelle celle de Lituanie des années vingt. Seule de ce genre dans toute l’Amérique centrale et méridionale, elle est soutenue comme une école d’État. On ne peut s’empêcher de relier ces innovations avec ce qui se fait aujourd’hui en matière de placement familial, d’aide aux aidants ou encore d’habitat inclusif pour personnes âgées. L’OSE d’aujourd’hui a su développer des structures innovantes en gériatrie, se saisir du handicap et du polyhandicap.